PROSPER André Bedos
Je suis né le 2 octobre 1924 à Perpignan. J’étais élève préparateur en pharmacie et n’éprouvais aucune sympathie pour les allemands, trouvant même qu’il y en avait trop. Craignant une rafle et un envoi en Allemagne, mon beau-frère, gendarme, me conseilla de prendre le maquis. J’ai obéi et en compagnie de Moïse, mon neveu, nous sommes partis pour le maquis, tous les deux, sans aucun bagage.
Arrivés à Prades, mon beau-frère nous remet à quelqu’un de la résistance. Nous sommes allés vers le col de Jau, où nous avons vivoté jusqu’à ce que les gendarmes nous délogent. Nous nous sommes enfuis vers le Roc du Roussillon entre Mosset et Rabouillet. Nous étions alors ravitaillés par la résistance locale. Il y avait là: Moïse, le Lièvre (qui a eu les pieds gelés suite à une tentative de passage en Espagne), Marceau (André Bonnet), Marin (Yves Fosset), Campommier et moi-même.
J’ai été nommé Prosper parce que dans les Pyrénées Orientales un Prosper avait été tué et il fallait le remplacer.
La vie au Roc du Roussillon était très dure, juste un pain et une boule de fromage à partager par semaine.
Au bout d’un certain temps nous avons décidé de quitter le lieu et d’aller voir ailleurs. Après avoir pris un mouton entier dans une cabane, nous sommes partis au hasard, car nous n’avions pas de montre, pas de boussole et pas de carte. Je me souviens durant le déplacement d’avoir pêché une minuscule truite qu’il a fallu partager en cinq.
Notre route nous amena vers Rouze et Mijanes où nous avons rencontré un homme qui nous accompagna au maquis. Le chef était Firmin, il y avait René, Paul (son frère), Pervenche et Octave.
Un beau jour, deux espagnols très bien armés, qui n’avaient pas la sympathie du groupe, arrivèrent au camp et se livrèrent à des actions pas très claires, ils partirent comme ils étaient venus.
Quelques temps après les Allemands nous ont attaqués.
Le camp était situé à environ un quart heure de la lisière de la forêt, après mon tour de garde, j’ai été relevé par Pervenche, peu de temps après, Marceau nous avertit de l’arrivée des Allemands. Personne n’a voulu aller avertir Pervenche, j’ai donc décidé de le faire et je suis retourné jusqu’au poste, mais entre temps il avait disparu. J’ai pris les armes et je me suis éloigné. A environ 1 km, j’ai retrouvé Moïse qui m’attendait. Nous avons marché et après une nuit sous la neige, nous avons rejoint le maquis Jean Robert.
Un jour, le message « le palmier est une plante exotique » est passé, il annonçait, pour nous, un parachutage la nuit suivante. Nous avons trouvé un camion et des voitures et nous sommes partis vers le lieu de largage. Nous avons préparé les feux et avons attendu.
Quand nous avons entendu l’avion, les feux ont été allumé et les signaux lumineux ont été effectués. L’avion a largué, un ou deux parachutes ne se sont pas ouverts et les containers se sont éventrés. Soudain un deuxième avion est arrivé, répondant aux signaux, il largua à son tour. Cette fois, c’était des hommes. Les copains criaient : « ne tirez pas ce sont des Américains ».
J’avais mis en joue un des Américains avec mon vieux Mauser de 1870 et quand j’ai vu son drapeau sur son épaule j’ai baissé mon arme et nous avons sympathisé. Il m’a offert du whisky. Vu le nombre, les Américains sont partis en premier et les véhicules sont revenus nous chercher plus tard.
Sur la photo avec Marti et les russes, je porte à la ceinture un pistolet 7,65 que j’ai pris à l’adjudant de gendarmerie de Limoux lors de notre attaque. Nous étions dans la gendarmerie lorsque l’adjudant a essayé de s’enfuir, je l’ai rattrapé et après l’avoir attaché à un arbre avec ses menottes je lui ai pris son arme.
J’ai été très touché par la mort de Marta car je le connaissais bien et il est mort sous mes yeux.